Programme architectural - Page 2/2
Au sud de la Thèbes occidental Amenhotep
III fit bâtir, à partir de l'an 30, une véritable
ville ; au coeur de ce nouveau noyau urbain, l'immense
palais de Malgatta. On entrait dans la résidence royale
par une cour à ciel ouvert (I) au fond de laquelle un
podium où se dressait vraisemblablement un baldaquin
destiné à accueillir le trône royal. On distingue une
première salle d'audience (III) pourvue également d'un
socle où siégeait Pharaon. Un seconde salle d'audience
(IV), beaucoup plus impressionnante, se dressait au
centre du complexe. Elle était constituée des trois
salles, deux vastes salles hypostyles auxquelles succède
la salle d'audience proprement dite, une pièce
tétrastyle, véritable salle du trône. Donnant
directement accès à cette dernière, les appartements
privés du souverain (V), reconnaissables à l'alcôve
qui abritait le lit royal. La Grande Epouse Royale, Tyè
(Reines et courtisans), disposait
de ses propres appartements indépendants (II) et de sa
propre salle d'audience (VII), une pièce octostyle munie
à son extrémité d'un podium où trônait la
souveraine, une résidence dans la résidence. Viennent
s'ajouter les innombrables bâtiments annexes
nécessaires à la vie de la cour : ateliers, cuisines et
autres greniers qui s'organisaient autour d'une place
centrale (VI). En édifiant ce nouveau complexe palatin
sur la rive occidentale de Thèbes, Pharaon déplace le
centre du pouvoir et l'éloigne ainsi de la rive est, de
son temple de Karnak et du tout puissant clergé d'Amon.
C'est le même schéma qu'appliquera, certes d'une
manière plus radicale, le fils et successeur d'Amenhotep
III, Akhénaton (1353-1336) (Une succession obscure et agitée) lorsqu'il fondera sa nouvelle capitale
: Akhetaton, aujourd'hui Tell-el-Amarna. De sa nouvelle
capitale, la ville d'Aton, loin de celle déchue d'Amon,
le souverain hérétique tentera d'imposer sa réforme
religieuse et la suprématie exclusive du
"Disque". S'élevant à 19,90 mètres, les deux géants de quartzite rouge veillent sur l'entrée de la nécropole thébaine. Ces deux imposantes représentations d'Amenhotep III présidaient jadis au temple des Millions d'Années du souverain aujourd'hui totalement ruiné. Taillées chacune d'un seul bloc, elle représentent le souverain trônant, les jambes encadrées par la Reine Mère Moutemouia et la Grande Epouse Royale Tyè (Reines et courtisans). En l'an 27 de notre ère, un tremblement de terre défigura les colosses ; dès lors chaque matin, la brise matinale s'engouffrant dans les blessures du géant septentrional alliée aux premiers rayons du soleil réchauffant la pierre produisaient des sons assez musicaux. Ceux ci furent assimilés aux plaintes de l'Ethiopien Memnon, tué par Achille dans les champs de Troie, et qui, à chaque aube, exhalait sa plainte vers sa mère Eos, l'Aurore, dont les rayons rendaient quotidiennement la vie à son fils. Mais l'Empereur Septime Sévère fit restaurer le monument, mettant fin aux plaintes du colosse et à la légende. A l'origine, les deux géant flanquaient le pylône d'entrée du temple qui devait mesurer près de 600 mètres de long, soit le plus grand temple funéraire jamais édifié dans la vallée thébaine, construit en grès, sous la direction du grand architecte Amenhotep fils de Hapou (Reines et courtisans). Il a aujourd'hui totalement disparu et il reste délicat d'en établir un plan ; deux cours successives devaient donner accès à une salle hypostyle débouchant sur une cour péristyle comparable au complexe édifié par Pharaon à Louqsor (Programme architectural). Viens, ô Amon Râ, Seigneur des
trônes du Double Pays, qui préside à Karnak, afin de
contempler ce que j'ai construit pour toi à l'ouest de
Thèbes, et dont la beauté s'unit à l'horizon de Manou.
En lui, tu traversera les cieux en paix, quand tu te
lèveras dans l'horizon du ciel, il sera illuminé par
l'or de ton visage, car sa face est orientée vers l'est
pour ton apparition radieuse ; tandis que pour ton
coucher, ton horizon sera toujours dans la vie. Tu
étincelles dès l'aube, chaque jour, et ta perfection
demeure à l'intérieur de ce temple, sans cesse. Je l'ai
bâti en belle pierre blanche de grès, grâce à un
travail bénéfique. Ma Majesté l'a pourvu de statues,
au moyen de la pierre que j'avais rapportée de la
Montagne Rouge. Lorsqu'on les vit en leur place, la
liesse fut grande à cause de leur haute taille. An 11, troisième mois d'akhèt, le
premier, sous la majesté de l'Horus (... suit la
titulature d'Amenhotep III) et de la grande épouse
royale Tyè. Sa Majesté a ordonné l'édification d'un
canal pour la grande épouse royale Tyè dans sa ville de
Djâroukha. Sa longueur est de 3700 coudées et sa
largeur de 600 coudées. Sa Majesté a célébré
l'ouverture des canaux durant le troisième mois
d'akhèt, le 16, en naviguant sur la barque royale
"Aton étincelant", qui lui tint ainsi lieu de
résidence. Le programme architectural d'Amenhotep III fut à l'image de son règne : grandiose et sans précédent. Parallèlement à son activité architecturale dans Thèbes, Pharaon couvrit l'ensemble des territoires de l'Empire d'une multitude de constructions. Impossible d'en dresser une liste exhaustive, certains édifices restent cependant incontournables. A El Kab, il fit édifier une petite chapelle tétrastyle à chapiteaux hathoriques ; à Eléphantine le roi éleva en l'an trente de son règne une magnifique chapelle reposoir. Mais c'est en Nubie que l'activité architecturale d'Amenhotep III, exception faite de la capitale thébaine, fut la plus importante ; le souverain érigea notamment à Soleb, entre la seconde et la troisième cataracte, le plus beau temple du Soudan. Construit en grès sur la rive gauche du Nil, son plan rappelle très fortement celui du temple de Louqsor (Programme architectural). En venant du Fleuve, on accédait au temple par un débarcadère qui donnait sur un imposant pylône précédant une longue allée de sphinx à têtes de bélier menant jusqu'à une avant porte constituée de quatre colonnes papyriformes à ciel ouvert ; un second pylône précédait une succession de deux cours péristyles qui donnait accès à une salle hypostyle de vingt quatre colonnes, suivaient le saint des saints et les nombreuses salles annexes dévolues à l'exercice du culte conjoint du roi et d'Amon Râ. A Sedeinga, toujours en Nubie, Amenhotep III fit élever un temple jumeau de celui de Soleb, et consacré au culte de la Grande Epouse Royale Tyè (Reines et courtisans). Pharaon contribua également à l'agrandissement du temple de Tabo. Toutes ces constructions nubiennes consacraient ainsi la domination égyptienne sur le pays et constituaient un moyen efficace d'y implanter de manière encore plus tangible le pouvoir de Pharaon. |